La médecine
comportementale repose sur une pratique éprouvée de longue date dans le
traitement de la douleur chronique (2) notamment. Ses méthodes sont issues de
travaux scientifiques expérimentaux*. Elles sont appliquées dans les thérapies
comportementales et cognitives**.
Dans certains cas,
cette approche médicale pourrait se substituer à la prescription
médicamenteuse. Ainsi, a-t-on vu récemment des médecins prescrire de l’exercice
physique à des patients hypertendus ou en surpoids ou stressés ou encore à des
diabétiques. Or, il s’avère que pour une population de diabétiques à haut
risque, les mesures glycémiques vont être améliorées essentiellement grâce à
des procédés de motivation à l’exercice physique et la perte de poids. Un
progrès pour des personnes présentant des affections moins sévèrement
invalidantes est également vraisemblable.
L’utilisation des
techniques comportementales au sein même des équipes médicales aurait par
exemple permis d’obtenir une amélioration des mesures pressionnelles de patients
hypertendus, parfois plus efficacement que par le biais de prescriptions
médicamenteuses (3).
Mais la
généralisation des techniques comportementales dans la pratique des médecins
est lente. Ils sont plutôt éduqués à recourir à la pharmacopée et à la
chirurgie pour contrôler la maladie et ils s’impliquent peu dans la dimension
comportementale de la question. Quand ils le font, ils sont influencés
par leur formation psychanalytique, ce qui les pousse à rentrer dans des
discours assez éloignés des préoccupations concrètes des patients. Et quand ils
ne sentent pas en mesure de rentrer dans ce « jeu », soit ils
négligent la dimension comportementale, soit ils adressent leurs clients à des
psychanalystes.
Néanmoins les
choses changent (4). Le développement de la médecine basée sur les preuves
(evidence based medicine), l’utilisation par les professionnels de santé de la
classification des maladies selon des critères incluant les comportements (CIM
10) (5), la formation des médecins intéressés, en France, par l’AFTCC (6) et
l’AMC (7) et l’intégration de comportementalistes dans certains services
(addictologie, sexologie, diabétologie, cancérologie, sommeil, douleur, ORL,
…). Par ailleurs, ces méthodes se développent hors des structures de soins pour
d’autres applications de la médecine comportementale : peur de l’avion
dans les aéroports, stress en entreprise, gestion des catastrophes et des
situations de guerre, violence urbaine ...
L’un des atouts
les plus importants de cette nouvelle médecine pourrait être une perspective
d’économie en terme de dépenses de santé, en ce sens qu’elle ambitionne de
transmettre aux patients un savoir-faire pour prévenir et s’adapter à la
maladie (8).
* :
Psychologie expérimentale : ce n’est pas la “psychosomatique”, laquelle
emprunte ses références aux théories psychanalytiques (9). La démarche de la
psychologie expérimentale repose sur le triptyque de l’expérimentation
scientifique : examiner et évaluer les modifications observées, déterminer
la spécificité du changement obtenu, vérifier les hypothèses de départ.
** :
L’application des thérapies comportementales et cognitives en médecine non
psychiatrique repose sur la psychoéducation (information sur le trouble, sur
son traitement, sur les attitudes de santé active à pratiquer régulièrement,
sur la gestion des symptômes, sur la prévention des rechutes), l’apprentissage
d’une relaxation comportementale (ni modification de l’état de conscience, ni
expérience spirituelle) dont le retentissement métabolique a été évalué
(régularisation du rythme cardiaque, diminution de la consommation d’O2, de la
pression artérielle, du rythme respiratoire, des lactates artériels, du tonus
des muscles lisses, augmentation ondes alpha à l'EEG, …) et un travail sur les
modalités d’appréhension psychologiques du trouble ; Le but de la médecine
comportementale est de diminuer la souffrance émotionnelle et d’optimiser la
liberté de comportements face à l’affection.
(1) : Behavioural
medicine: changing our behaviour, British Medical Journal Volume 332 pp 437-8
(2) Queneau P & Osterman G, Soulager la douleur, Odile
Jacob, Paris, 1998
(3) Fontaine
O, Kulbertus H & Étienne AM, Stress et cardiologie, Masson, Paris, 1996
(4)
André C, Lelord F & Légeron P, Chers
patients : petit traité de communication à l'usage des médecins, Éditions du
Quotidien du Médecin, Paris, 1997
(5) CIM
10
(6) Institut d’enseignement de l’AFTCC : www.aftcc.org , DU « méthodes comportementales en
médecine» Faculté St-Antoine Paris VI.
(7)
Association pour la Médecine
Comportementale : www.asso-medecine-comoprtementale.org
(8) Wiseman
R, Notre capital chance, Lattès, Paris, 2003
(9) Dantzer
R, L'illusion psychosomatique, Éditions Odile Jacob, Paris, 1989
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